
Tous les feux de midi s'emparent de la forme facillante de Marie. Son visage s'embrase, son jeune corps lutte et se cramponne à un équilibre de plus en plus fragile. [...]
Ici, comme en d'autres régions, chacun retrouve des raisons de haïr, de châtiers, de massacrer. Avec ses bottes gigantesques aux semelles de plomb, l'Histoire rabâche, broyant sur son passage les Hommes et leurs lieux. [...]
Sous le soleil féroce, rapace, Marie se débat.
Marie sermonne son corps, lui ordonne de faire face, de lutter. Par moments, ce corps se disloque : les genoux cèdent, le torse se courbe, la nuque ploie. Le sol l'aimante tout entier vers une chute inexorable, un puits sans fin.
Marie reprend les rênes, se ressaisit, tient tête à cette chair en perdition. Sa pensée se mobilise, interroge, inspecte les muscles, les tissus qui se relâchent, les mains qui s'amolissent, les pieds qui glissent. Elle tente de se rassurer, se persuade qu'elle parviendra à tout dominer, à soumettre cette charpente à sa volonté, à son désir violent d'avancer et de se garder en état, jusqu'à la rencontre... [...] Marie déploie sa volonté, toute son habitilité ; elle parle à son corps et le flatte : "On y va ensemble, tu n'abandonnes jamais, tu es solide, tu es fait pour durer..." Elle lui parle comme s'il s'agissait de quelqu'un d'autre, comme si la chair et l'esprit étaient soudain séparés et qu'il fallait à tout prix les rassembler, les réunir pour vivre encore. Pour vivre !
Ici, comme en d'autres régions, chacun retrouve des raisons de haïr, de châtiers, de massacrer. Avec ses bottes gigantesques aux semelles de plomb, l'Histoire rabâche, broyant sur son passage les Hommes et leurs lieux. [...]
Sous le soleil féroce, rapace, Marie se débat.
Marie sermonne son corps, lui ordonne de faire face, de lutter. Par moments, ce corps se disloque : les genoux cèdent, le torse se courbe, la nuque ploie. Le sol l'aimante tout entier vers une chute inexorable, un puits sans fin.
Marie reprend les rênes, se ressaisit, tient tête à cette chair en perdition. Sa pensée se mobilise, interroge, inspecte les muscles, les tissus qui se relâchent, les mains qui s'amolissent, les pieds qui glissent. Elle tente de se rassurer, se persuade qu'elle parviendra à tout dominer, à soumettre cette charpente à sa volonté, à son désir violent d'avancer et de se garder en état, jusqu'à la rencontre... [...] Marie déploie sa volonté, toute son habitilité ; elle parle à son corps et le flatte : "On y va ensemble, tu n'abandonnes jamais, tu es solide, tu es fait pour durer..." Elle lui parle comme s'il s'agissait de quelqu'un d'autre, comme si la chair et l'esprit étaient soudain séparés et qu'il fallait à tout prix les rassembler, les réunir pour vivre encore. Pour vivre !
Andrée Chédid, Le Message
Je venais. Je t'aime.
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